Un jour, pour changer de vie, Sergio Alvarez a créé sa passerelle entre l’univers financier qu’il a beaucoup aimé et l’art qui le passionne. Et ça lui réussit plutôt bien !
Conseiller en acquisition d’œuvres d’art ou en constitution de collections, il est régulièrement invité en tant que commissaire d’expositions. Sa nonchalance précise, son œil sincère séduisent les artistes. Alice Gauthier, qui explore avec poésie les rapports humains entre réalité et imaginaire ou Jean-Marc Caradec avec ses rêveries photographiques lui ont dernièrement confié la présentation de leur travail. Sergio n’est pas tombé petit dans la marmite de l’art ! Pour rembobiner, rendez-vous au 4ème étage d’un immeuble cossu d’une ville de l’ouest parisien. PARIS est à portée de main. Il reçoit dans un écrin tout blanc rangé au cordeau qui laisse toute la place aux œuvres. Des peintures, des sculptures, de la photo. Dehors, il fait froid et gris mais le regard chaleureux derrière la porte réchauffe immédiatement. Son nom l’indique : Sergio Alvarez est un rayon du soleil d’Espagne.
Petit-fils de réfugiés politiques de la guerre d’Espagne, il nait à Paris, vit et grandit à Bobigny en banlieue parisienne, une ville où toutes les religions, toutes les races vivent en parfaite harmonie. Une scolarité brillante, de celle qui tranquillise les parents, le mène sur les bancs d’Essec alors que la philo a sa préférence. Ce n’est qu’un demi-choix ! et pourtant logique au regard des deux caractéristiques de sa personnalité: sa difficulté à faire des choix et son angoisse chevillée au corps de manquer d’argent. Cette option d’études devrait lui assurer un métier qui lui garantira un toit et le ciel bleu. Diplôme en poche, il passe une quinzaine d’années en salle des marchés puis crée une boite dans les énergies renouvelables et le solaire à l’époque où peu surfait sur la vague. Et l’art ? quand ? comment ? Sa première petite amie, étudiante en art, sera son premier contact avec la sphère artistique. Elle tisse ce lien avec l’art qui ne le quittera plus, l’ouvre à un univers qui lui est étranger. Lors d’une visite à Beaubourg, il est submergé d’émotion devant « l’atelier au mimosa » de Bonnard. Ebloui par les couleurs, le flou entre intérieur et extérieur, cette œuvre reste pour lui, la plus désirable.
Deuxième grande claque de bonheur « les magiciens de la terre », une exposition légendaire qui se déroule simultanément à Beaubourg et à la Halle de la Villette. Une confrontation entre artistes de tous les continents, entre des pratiques de création jusque-là invisibles. Un dialogue interculturel qui suscite chez Sergio une envie de s’impliquer, de vivre avec des œuvres ad vitam aeternam. Par chance, son job est lucratif et la belle voiture rouge n’est pas sa tasse de thé ! Peut-être a-t-il du mal à faire des choix, mais celui de sa première acquisition fait partie des meilleurs. Une œuvre de François calvat, un artiste isérois qui, toute sa vie, a transformé en œuvres d’art des objets de récupération et exploré toutes les densités du noir. Un premier « investissement » comme un starter pour visiter toutes les expos, galeries, salons y compris à des milliers de kilomètres grâce aux voyages artistiques, rares à l’époque, organisés par ArtProcess. Le fondateur Eric Mezan fait partie des personnes importantes pour constituer son bagage artistique, favoriser les rencontres avec des collectionneurs, visiter les « bonnes » galeries, être dans les évènements inspirants. Ses deux sociétés vendues et aucun projet captivant en vue, Sergio s’inscrit à Drouot Formation pour tout connaitre du métier d’art advisor. Il constate qu’une strate de non- collectionneurs avec un certain pouvoir d’achat est délaissée dans la découverte et les méandres de l’art contemporain.
L’expérience, la connaissance du marché acquise au fil des années, la formation et une grande disponibilité, de discrétion sont ses ingrédients pour prendre soin de ses clients. Son credo est d’apporter aux amateurs une dose de plaisir quotidien « quelque chose qui ne sert à rien mais qui est le sel de la vie ». Quelle joie de vivre avec une œuvre sur papier de Lee Bae, une sculpture en os de Corine Borgnet, une céramique de Françoise Petrovitch, une pièce de Robert Boublil ou encore l’aurore colorée de Sébastien Kito Avec une empathie bienveillante, il guide dans le parcours des galeries et le décryptage des artistes qu’elles représentent. En effet, certaines ne prennent pas toujours la peine de justifier les prix parfois élevés de l’écurie qu’elles représentent. Etant lui-même collectionneur depuis de nombreuses années, Sergio connait toutes les questions que peuvent se poser ses clients comme l’authenticité, la traçabilité, l’état de conservation d’une œuvre. La qualité artistique de la pièce convoitée ainsi que son positionnement dans le parcours de l’artiste ont également une place essentielle. Rien ne parle mieux qu’un exemple !
Alors, oui, il prend plaisir à montrer la différence entre un Bon JonOne et un mauvais ou un bon Combas et un mauvais. Avec son vécu de collectionneur, il a à cœur d’éviter à ses clients les regrets d’un achat manqué.
Une anecdote le désole régulièrement depuis plusieurs années. Addict à la peinture, il est passé à côté d’une série de 10 tirages argentiques de portraits de Patti Smith par Robert Mapplethorpe. Empreinte émotionnelle indélébile que seule la photo peut créer. Sans doute le déclencheur vers la photographie. Il n’est ni un fan des dédicaces, ni des files d’attente et pourtant, lorsque Nan Goldin est passé chez Artcurial, il a patienté presque 3h00 pour avoir la signature de l’artiste dont le regard le subjugue. Ses images radicales sur la fête, la drogue, la violence, le sexe ou la mort ont marqué sa génération. Était-ce pour la puissance affective que recèlent ces photos ? Des échanges et moments passés avec ses clients, il effectue des recherches, propose, éclaire les choix, épaule pour les sujets de défiscalisation, crée des liens, embarque dans sa passion et reste l’homme des opérations stratégiques sur le long terme. Pour lui, l’art n’est pas un investissement à court terme.
Instagram : sergio.alvarez.artaccess
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