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CONVERSATION AVEC JEAN LE GAC

Marie-Laure Desjardins

Cher Jean, j’imagine que vous n’attendiez plus cet entretien réalisé il y a bien des mois. S’il est vrai que la vie est un roman, les rebondissements existent eux aussi. Me voilà après 30 années à Paris revenue sur la terre de mes ancêtres (de ceux qui brûlent leurs vaisseaux pour n’avoir jamais à reculer). Cachet de la Poste faisant foi. Je ne sais où le confinement vous a saisi, ce pourquoi je doublerai cette lettre d’un courriel, sans trop d’illusions toutefois. Tant je connais votre peu d’assiduité à surfer l’Internet. Un ami m’a rapporté qu’aux Etats-Unis, certaines lettres étaient arrivées à destination un siècle après avoir été postées. J’aimerais tant en recevoir une rédigée par mon arrière-grand père. Vous ai-je jamais raconté qu’il était peintre lui aussi ? A l’occasion, je vous montrerai la seule photo que j’ai de lui. Il est mort en 1918 de la grippe espagnole comme beaucoup et aucune de ses toiles n’est parvenue jusqu’à moi. Il m’amuse parfois de penser que je lui dois cette curiosité pour les ateliers. En attendant de vous revoir bientôt, recevez mes plus amicales pensées, à partager avec Jacqueline.

Les phrases bleues en lignes serrées se pressent dans le blanc de la page. Quelques coups orange de Stabilo marquent les points importants alors que fièrement des ratures témoignent d’une pensée en action. Les deux précieuses feuilles sont calées là depuis près de 10 ans. A l’époque, Jean Le Gac exposait sous couverture et avait accepté de formuler d’anonymes réponses à mes questions. Ses notes étaient posées sur la table avec le café. C’était la première fois qu’un artiste écrivait pour moi. La convoitise devait se lire dans mes yeux car je n’eus pas à les demander. Le gentleman les glissa dans Le Peintre Masqué avant de me l’offrir. C’est là que je décidai de les laisser et sus les retrouver pour donner son élan au texte d’aujourd’hui. « L’autre jour, j’ai assisté à la présentation d’un livre qui dissertait sur le bavardage, ce qui m’a fait dresser l’oreille. Car c’est le nom d’une de mes œuvres des années 1970. L’auteur expliquait que contrairement à ce que nous pensons parfois, le bavardage révèle une vraie pensée. Votre proposition de conversation est donc très bienvenue ! D’autant qu’on imagine tout de suite les protagonistes. Bien assis dans un fauteuil. Les hommes, voire les dames, fumant un cigare, et buvant un alcool. » L’imagination s’envole et fait de nous les personnages d’un roman. La fiction a toujours joué un rôle considérable dans l’œuvre de Jean Le Gac. Le Peintre aime les histoires et cela ne date pas d’hier. A dix ans, il en inventait déjà sur le chemin de l’école. Trois kilomètres aller, trois kilomètres retour, lui donnaient l’occasion de divertir ses copains avec des feuilletons dont certains épisodes occupaient jusqu’à la récréation. Avant d’être l’enfant qui peint, il a été l’enfant qui raconte...

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