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CATHERINE LEROY, LES FÊLURES DE LA GUERRE

Jeanne Morcellet

Primée et récompensée, adulée et détestée, oubliée in fine en France, Catherine Leroy convoque une figure puissante et reconnue du photojournalisme aux États-Unis. Prix Georg-Polk en 1967, médaille d’or Robert Capa en 1976, Picture of the Year en 1987, elle accumule les succès portés par un talent, une audace, une détermination et un courage inouïs – comme autant de qualités électrisées par une personnalité complexe et un sale caractère.

Catherine naît dans une famille catholique et conservatrice de la bonne bourgeoisie. Les conventions l’ennuient. Au piano classique elle préfère le jazz, à la danse classique le parachutisme. À 21 ans, elle vise l’aventure, la grande, et part pour la guerre et le terrain. Du haut de son mètre 48 et de ses 40 kilos, elle n’a peur de rien ni de personne. Avec pour seules armes son Leica et sa volonté, la fille aux tresses blondes et au regard d’acier débarque au Vietnam pour 3 ans – et pas 3 mois comme elle l’avait promis à ses parents. Bientôt, elle signe des images fameuses, cadrées au plus près des corps et des cœurs.

Unique journaliste à photographier en plein saut l’opération aéroportée « Junction City », elle dérange aussi. Dans un monde d’hommes, elle irrite. Son caractère trempé, son endurance hors norme, sa colère détonnent : elle jure, porte treillis et barda, se débrouille bien dans la jungle, vend ses photos à AP et assoit une réputation internationale.

Plus tard, elle court le monde et raconte d’autres champs de bataille, au Moyen-Orient, en Afrique. Partout où elle va, elle se faufile et mitraille, toujours libre, indépendante, décidée, farouche. Un temps, elle tente de rompre avec la guerre, s’installe aux US et porte son objectif sur la mode. Mais le bruit, la fureur, le tragique accompagneront à jamais son imaginaire. Les souvenirs de violence, de folie, de peur et d’angoisse ne cesseront de marquer et de ronger sa mémoire et son corps. Alors, à l’aube de la soixantaine, en 2006, Cathy s’éteint, du côté de LA, dans la quasi-misère, la solitude et l’oubli.


Légende et crédit de la photo :

Vietnam, 1966-1968 © Dotation Catherine Leroy
Aujourd’hui, le musée de la Libération de Paris expose pour partie son travail au sein de la rétrospective Femmes photographes de guerre où Cathy l’intrépide côtoie jusqu’au 31 décembre Lee Miller, Gerda Taro et cinq autres grands noms du photojournalisme.

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