AGATHE WAECHTER
Jordanie - 2024
NOWHERE NEAR
La Jordanie est connue pour son hospitalité sans faille dans le Moyen-Orient. Royaume "paisible" réputé pour sa neutralité, son développement, son système de soins et ses droits humains, là où Petra, l'une des sept merveilles du monde moderne côtoie les paysages lunaires du Wadi Rum, où les coraux de la Mer Noire rivalisent avec les eaux hautement salées de la Mer Morte, où l'histoire de l’Humanité atténue les conflits voisins. Pourtant, si le tourisme fait vivre une grande partie de la population, la fréquentation a drastiquement diminué depuis la pandémie de 2020 et le génocide en Palestine. J'ai visité ce pays en mars 2024, pendant le ramadan. Il n’y avait pas - ou très peu - de touristes occidentaux.
Cette série inscrit les "must-sees" de la Jordanie dans un paysage de simulacres : sans touriste, que reste-t-il du décorum ? À l'instar de l'Amérique de Jean Baudrillard, la Jordanie cumule les signes et les symboles plus que la substance réelle. Lorsqu’on porte son regard en dehors des sentiers battus, on trouve des restaurants aux portes closes, des bédouins endormis aux keffiehs made in China, des étals de marchés abandonnés, des infrastructures désuètes, des gardes portant des déguisements pour faire semblant d'appartenir à l'Histoire, des animaux accoutrés de parures qui semblent reprendre possession des territoires, des hommes solitaires scrollant leurs téléphones ou jouant avec la décadence, des marques du capitalisme et de l'hégémonie culturelle occidentale qui s'effacent progressivement.
Les photos de cette série montrent les stigmates du tourisme de masse qui masquent la véritable nature des choses : il ne reste qu'une performance, simulation d'un héritage passé et d'une économie dépassée. La réalité culturelle reprend petit à petit sa place. Les femmes disparaissent. Que reste-t-il de la globalisation ?
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