ARTSHEBDOMEDIAS, L'INTERVIEW
Pierre Léotard
Corridor Eléphant et ArtsHebdoMedias ont amorcé un partenariat il y a quelques années qui se concrétise depuis janvier par un échange de contenus. Nous suivons avec intérêt et assiduité depuis plusieurs années la revue qui donne à voir autant qu’à réfléchir. Mais « qui » est, et que fait ArtsHebdoMedias ? Nous avons rencontré sa fondatrice Marie-Laure Desjardins.
- Qu’est ArtsHebdoMédias ?
Marie-Laure-Desjardins. – ArtsHebdoMédias est un site d’information consacré à l’art contemporain, un média de référence dans son domaine, notamment en France. Il s’intéresse à la diversité de la création plastique et exclusivement aux artistes vivants dont la parole est pour nous un patrimoine à collecter, à transmettre et à conserver. Toute la démarche d’ArtsHebdoMédias est fondée sur cette certitude et sur la conviction que l’art est non seulement un vecteur de connaissance, d’expérience et d’enthousiasme mais aussi une dimension fondamentale pour toute société. Ce pourquoi nos contenus sont en accès libre.
- Quand, pourquoi et dans quel contexte l’avez-vous créé ?
Le 17 février 2009, les journalistes « papier » que nous étions s’aventuraient pour la première fois sur le web. Les articles d’alors avait des allures de brèves ! Nous testions le « dispositif » et ne savions pas ce qu’il allait advenir de nos envies d’informer sur l’art contemporain et les artistes vivants. Nous n’avions décidé de rien sauf de poursuivre un travail débuté quatre ans auparavant dans le cadre de la revue d’art Cimaise, qui devait cesser son activité. Ce 17 février 2009, nous n’imaginions pas que, 13 ans plus tard, nous serions forts de plus de 11 000 contenus textuels, 15 000 lecteurs mensuels, de milliers d’artistes évoqués, quelque 2 300 lieux touchés, 3 400 abonnés à notre newsletter, sans oublier la création d’une revue scientifique et d’un Objet Média Non Identifié !
À qui s’adresse ArtsHebdoMédias ?
ArtsHebdoMédias travaille pour ses lecteurs. C’est à eux que nous pensons dans les ateliers, les expositions, les salons..., partout où nous sommes en contact avec les artistes et les œuvres. Notre souci est constant : rendre compte au plus juste et au plus sensible de ce que nous avons la chance d’appréhender. Ce lecteur idéal, nous le rencontrons parfois à l’occasion d’un événement ou d’un déplacement. Il veut toujours savoir pourquoi nous avons choisi de lui faire découvrir une chose plutôt qu’une autre. Avec lui, nous partageons nos choix, nos engagements, notre vision de l’art et forcément un peu du monde. Choisir le web et la gratuité, c’est choisir d’élargir ce lectorat à tous ceux qui de près ou de loin s’intéressent à l’art contemporain et aux artistes vivants. Aujourd’hui, notre lecteur type est un homme (54 %), de moins de 34 ans (60 %), installé en France (76 %) et qui nous lit essentiellement sur son ordinateur (63 %).
Comment définiriez-vous la ligne éditoriale ?
Ouverte et transversale. D’emblée nous avons accueilli dans nos colonnes des plasticiens de toutes les disciplines, géographies et générations. Nous adorons les intersections – art & science, art & technologie, notamment –, enquêter sur des matériaux particuliers comme les odeurs, le son ou l’or, inventer des formats rédactionnels, comme le Jeu des mots, plonger dans des univers immersifs pendant des heures, comme avec DAU, travailler avec des chercheurs d’autres domaines comme les neurosciences, l’anthropologie, la physique, la sociologie, la neurobiologie, la microscopie, la psychanalyse, la science des matériaux... Nous envisageons l’art comme une ouverture à 360° qui nous mène au cœur du monde et de son actualité mais aussi des imaginaires, des mythologies individuelles et collectives, des fantaisies et de la poésie. Nous sommes motivés par la découverte et l’apprentissage de toutes les connaissances artistiques ; j’en profite pour préciser que notre contenu est librement décidé par la rédaction et non dicté par des annonceurs.
Quelles sont les principales évolutions de la revue au fil du temps ?
Nous n’avons fait que creuser notre sillon : affirmer notre engagement auprès des artistes vivants en étant fidèles à ceux que nous connaissons depuis l’origine sans jamais oublier d’être curieux de nouvelles œuvres, ouvrir nos colonnes à tous les types de création plastique sans jamais oublier les beaux-arts. Au fil du temps, nous avons tissé des liens avec de nombreux universitaires et chercheurs ce qui nous a conduit en 2020 à lancer, avec le soutien de l’Université Bordeaux Montaigne, une revue d’esthétique en ligne, ASTASA, consacrée à l’intersection Arts & Sciences & Technologies, que je codirige avec Cécile Croce, codirectrice du laboratoire MICA de l’UBM. La même année, nous nous sommes lancés dans l’aventure d’OMNI, qui n’est qu’au début de son vol.
Qu’est-ce qu’OMNI ? Comment vous en est venue l’idée ?
OMNI pour Objet Média Non Identifié. Souvent les idées viennent quand on a le sentiment d’avoir fait le tour d’une chose ou d’un système. Quand poser des questions m’est apparu comme un balisage premier des réponses, j’ai proposé à certains interlocuteurs de s’adonner au Jeu des mots. Quand ils acceptent, je leur en soumets 10, qu’ils interprètent comme ils le souhaitent. C’est un exercice de liberté passionnant et toujours surprenant. C’est nécessaire de se décaler, de proposer de nouvelles manières d’informer. OMNI est né de l’envie d’inventer et aussi de retrouver un médium tangible, le papier, sans pour autant abandonner le numérique. Le site est le vaisseau amiral mais la flotte peut être composée de différents navires ! OMNI est donc hybride. Chacune de ses éditions est consacrée à la parole des artistes et à un thème. Le premier opus s’intéresse au dessin et met en avant la voix de douze artistes déjà présents dans les colonnes d’ArtsHebdoMédias. En bon Objet Média Non Identifié, il n’a pas de périodicité et doit se réinventer à chaque numéro. Et peu importe qu’il n’entre pas dans aucune case !
Comment imaginez-vous le futur de la revue ?
Au présent. Nous n’avons jamais eu de plan, que des envies et des engagements résumés dans notre credo : « Pour l’info, pour l’art, pour tous ».