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PATRICE PICARD

Autodidacte, je pratique la photographie en amateur depuis une dizaine d’années. La fréquentation des travaux de nombreux photographes (Stephen Shore, Lewis Baltz, Luigi Ghirri, Raymond Depardon, Philippe Bazin, Thibault Cuisset...) m’éclaire et me stimule. Leurs regards et leurs singularités, croisés avec mes propres goûts et tentatives personnelles, ont permis à mon travail de prendre corps et de se préciser au fil des ans. Plusieurs axes se sont imposés à moi : le paysage urbain, le paysage de campagne, mais aussi les choses désuètes, banales, abandonnées, aux marges de notre expérience quotidienne. Pour chaque prise, je pense couleur et cadre, j’élimine autant que possible le superflu et l’anecdotique afin de traduire en image, au plus juste, l’essence de ce qui nous apparaît. Pour moi, la bonne image doit sembler évidente tout en offrant de la complexité, en créant de la friction. Je suis particulièrement attaché à mettre à jour des forces qui sous-tendent notre réalité contemporaine, notamment la tension entre passé et présent, création et décrépitude, production et abandon, ou encore nature et domestication. Fin 2020, j’ai publié mon premier livre « Boutiques et devantures ».

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Boutiques et devantures
Une persistance fragile mais insistante.
De ces boutiques et devantures, je fais un portrait, généralement de face et en pied, qui rejoindra ma collection, modeste inventaire à la Atget d’une forme de culture populaire. Sur ces clichés, personne n’apparaît et pourtant, chaque fois, je ressens fortement une présence humaine. Ces façades sont des visages qui nous racontent chacune des aventures, individuelles ou collectives, passées ou encore présentes. Par-delà leur charme désuet ou leur apparente décrépitude, je vois des vies de travail ingénieuses, des caractères affirmés ou discrets, des désirs réalisés ou envolés.
Dans nos rues à l’aspect globalement standardisé, ces devantures semblent ouvrir une faille temporelle et attirer notre attention sur une forme de beauté et de modernité singulière, venue du passé. Car elles étaient modernes à leur époque, affirmant haut et fort le talent d'un architecte ou les goûts personnels d'un propriétaire, témoignant de la mode du moment comme de la force d'innovation ou de l'originalité d'un individu. Lorsque nous leur prêtons attention aujourd’hui, cette modernité d’alors entre en résonance avec notre goût contemporain pour le design, notre volonté de donner aux façades de nos villes une identité visuelle qui puisse toucher le spectateur, déclencher chez le passant plus qu'une simple envie de consommateur : une émotion esthétique.
Loin d’être des vestiges voués à la perte, ces vitrines constituent une trame essentielle de notre tissu urbain. Par leur persistance fragile mais opiniâtre, elles nous rappellent un sens de la créativité, de l'élégance ou de l’extravagance, du minimalisme ou de l'audace qui fait parfois cruellement défaut dans nos horizons citadins et qui pourtant parle à notre sensibilité.
Laisser une trace photographique de ces devantures, c’est ouvrir commerce avec le passé sans regard nostalgique, en reconnaissant leur importance dans notre monde contemporain et en leur faisant une place dans notre imaginaire collectif.

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