JEAN BERNARD SOUDERES
Résiduel
C’est une enquête qui a commencé avec la série « Traces ». J’opérais alors des prélèvements photographiques d’empreintes laissées par mon passage dans différents lieux de vie d’une durée d’occupation variable. L’érosion des matériaux et la transformation des surfaces informaient sur quelques attitudes du mode de vie en ces lieux… Il me fallait poursuivre vers d’autres territoires à la recherche d’autres traces, « plus objectales », plus solides, plus épaisses que les précédentes.
Les entrepôts utilisés pour l’accumulation, le tri, l’empaquetage des résidus de la consommation s’imposaient comme nouveaux sites de mes recherches. Je les ai considérés comme des sites archéologiques. Face à l’immensité du tas, nous pourrions craindre notre future asphyxie. Pour la bonne conservation de l’espèce, il a fallu transformer l’encombrant amoncellement des rejets de vies en matière en devenir. De l’observation attentive d’une façade de compressions ou d’une colline de détritus en liberté, faisons une lecture anthropologique. Dans les moindres détails, les objets « en reste » racontent les tensions et les contradictions de notre relation équivoque. Tous les matériaux m’intéressent pour autant qu’ils nous renseignent sur leur origine et leur destination. Il y a comme une gracieuse ironie dans le corps de ces objets broyés que nous avons côtoyés quotidiennement. Neufs, ils ont été choisis pour leurs qualités et les attentes que nous en avions. Mais la relation est éphémère et sans équivoque, pour qu’un jour nous décidions de leur totale inutilité et, soulevant le couvercle d’une poubelle, nous les déposions pour une destination finale inconnue et les oubliions avec légèreté.
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