ENZO LUCIA
Passionné de photo et de skate, Enzo Lucia grille des pellicules depuis ses douze ans.
A quatorze ans, il shoote indifféremment peaux tatouées et potes skaters.
Sept ans plus tard, le jeune photographe décide de plonger dans la chimie ancestrale.
Installé à Châlon-sur-Saône, berceau de la photographie dont il est originaire, ou dans son van en vadrouille, Enzo étend le collodion.
Dans l’ancienne vinaigrerie du XIXe transformée en studio-cabinet de curiosités, derrière son antique appareil à soufflet, Enzo cultive “le beau”.
A tout juste 30 ans, devenu maître en collodion humide, il se plaît à concocter sa propre chimie maison. Expérimenter, manipuler, fabriquer.
Sous ses éclairages spécifiques, Enzo glorifie l’engagement du tatoué. La série Noir Sang, shootée à fleur de peau, témoigne des traces sacrées, des mémoires d’encre.
Ferrotype, ambrotype, la plaque plongée dans un bain d’argent se développe dans l’urgence. Elle délivre une image unique qui ne bougera pas dans le temps. Immortalité.
Nouvelle Shéhérazade au buste recouvert d’une dentelle d’encre, full body tournant le dos ou jaugeant délicatement notre regard, messages ancestraux du prisonnier ou dessins séculaires d’un Vietnam éternel, l’œil du photographe et les recettes du chimiste composent ces tableaux sans pareil, révélés par le procédé inchangé depuis 1850. Éternité.
Le spectateur ignore le passage du temps, le photographe s’en moque et le modèle s’échappe.
L’esthétique intemporelle du collodion délivre ces portraits d’une beauté singulière. De dos, de face, les corps s’affirment, uniques linéaments.
L’éphémère, la transformation, l’être en devenir reposent, désormais indélébiles, sur les plaques créées par l’artiste.
Catherine Raspail
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